Renouvellement des voies au Stauffacher: une planification parfaite assure l’ordre dans le chaos

Le Stauffacher à Zurich est en cours de rénovation intégrale. Un moment-clé pour le projet de construction sous la direction du service des ponts et chaussées de la Ville de Zurich a été le premier de deux week-ends de renouvellement des voies. Les rails de tram du nœud de circulation central ont été remplacés au cours d’un marathon qui a duré jour et nuit. Il a fallu pour cela organiser un déroulement planifié à la minute près. Car les trams devaient reprendre le service à cinq heures précises le lundi matin.

Avec son puissant grappin, l’excavatrice de 100 tonnes saisit l’extrémité libre du segment de rail enchâssé dans le béton. Le conducteur de l’excavatrice passe la marche arrière et appuie sur la pédale de l’accélérateur. A grand renfort de vrombissements, son engin tire sur le rail du tram pour l’arracher de son lit. Mais l’entraînement à chenille n’a pas prise sur le béton lisse et le colosse enchevêtré dans les rails bascule dangereusement vers l’avant.

Nous sommes le vendredi, à deux heures du matin. A cette heure, ce sont normalement les fêtards qui dominent le Stauffacher, mais aujourd’hui, c’est une armée d’ouvriers de la construction avec leurs machines. La démolition difficile des rails le long de la Badenerstrasse est l’un des étapes clés de la rénovation du nœud de circulation zurichois, comme l’explique Marc Fleury. L’expert en génie civil de Basler & Hofmann accompagne avec son équipe les travaux de transformation de la place, du projet de construction à la mise en service, et il est aujourd’hui chef de chantier sur place. Le démontage des anciens rails y bat son plein. Enfin, les chenilles de l’excavatrice de démolition ont prise et le grappin, une pince pesant cinq tonnes, arrache le rail de son lit en béton avec un bruit assourdissant. Un segment de fer abîmé d’environ quatre mètres de long se balance maintenant au bout de l’excavatrice. Il reste des débris de béton qui sont maintenant dégagés par des excavatrices de plus petite taille. Elles ressemblent à des jouets à côté du colosse de démolition.

Travaux d’achèvement de la démolition

L’excavatrice de démolition s’attaque au prochain rail. Le conducteur est en contact radio avec un collègue qui observe chaque mouvement de l’engin. Son travail consiste à veiller à ce que l’excavatrice ne touche ou même n’endommage pas la caténaire suspendue juste au-dessus de lui. «Il faut absolument l’éviter», dit Marc Fleury, qui occupe également un poste d’observation, en sécurité à quelques mètres de là. On ne peut se permettre aucun retard. Surtout pas à cet endroit, le Stauffacher étant l’un des carrefours les plus importants du réseau de tram de Zurich. Près de 50’000 personnes transitent quotidiennement ici. «Paralyser un tel nœud pendant une période prolongée est hors de question», dit Marc Fleury.

La durée totale des travaux de construction est de huit mois. Sous la régie de l’Office des ponts et chaussées de la ville de Zurich et des transports publics zurichois (VBZ), les arrêts existants jusqu’à présent sont entre autres réaménagés de manière plus attrayante et accessibles à tous et l’arrêt de tram de la ligne 8 est déplacé vers le côté sud du carrefour. Ces mesures sont destinées à fournir plus de place aux rames de tram plus longues, qui passeront sur le pont Hardbrücke à partir de décembre 2017. Mais parmi les mesures prévues, seule la rénovation des voies de tram très usées bloque entièrement la circulation des trams et doit donc être réalisée sur un week-end, un tour de force planifié à la minute près. A partir de lundi matin à cinq heures, les pendulaires doivent pouvoir traverser à nouveau sans problème le Stauffacher pour se rendre au bureau.

Une chorégraphie minutieuse

C’est la raison pour laquelle les travaux de préparation avaient déjà commencé depuis des heures avant que l’excavatrice de démolition n’intervienne. Dans un premier temps, des spécialistes en caténaires ont déplacé les lignes électriques d’environ un mètre pour les aligner à la nouvelle position des voies. Tandis qu’ils effectuaient encore les derniers travaux à partir de leur nacelle élévatrice, des machines de découpe ont commencé à s’attaquer aux rails et à les sectionner en segments de quelques mètres de long. Puis des excavatrices sont arrivées et ont enlevé le revêtement de la chaussée en le raclant avec des pelles aux arêtes saillantes. Des excavatrices équipées de marteaux hydrauliques sont ensuite arrivées pour briser la couche de béton supérieure. D’autres machines ont déblayé les gravats, aidées dans leur tâche par des ouvriers de construction qui ont eux mis aussi la main à la pâte.

Ce travail en commun des machines et des ouvriers du chantier peut paraître chaotique au premier coup d’œil, mais on découvre ensuite que tout s’enchaîne dans un ordre prédéfini. Tout le chantier est un chef d’œuvre de virtuosité logistique: «Pour réussir le renouvellement des voies dans un délai aussi court, nous devons planifier le déroulement des étapes jusque dans les moindres détails avec tous les participants au projet», indique Marc Fleury. Par conséquent, les mouvements de chaque machine et de chaque personne sont minutieusement chorégraphiés.

Un retard imprévu

Il n’y a pas beaucoup de marge pour les imprévus. Mais Marc Fleury s’y attend: «Il y a des surprises à chaque projet de construction», dit-il. Les circonstances vont lui donner raison. Un projet partiel, qui devait rester en arrière-plan, se retrouve soudain au centre de l’attention. Il s’agit de travaux sur une conduite d’eau située en plein milieu du carrefour. C’est-à-dire là où l’espace est le plus restreint et où l’essentiel des travaux a lieu. «D’après le plan, la conduite ne devait être recouverte que de gravier», explique l’expert en génie civil. Mais au lieu de cela, une épaisse couche de béton est apparue sous le revêtement de la chaussée. Les ouvriers de construction doivent maintenant la briser avec un marteau à deux mains. Cela prend du temps qui n’était pas planifié de cette façon – et retarde les travaux suivants.

Le retard a des répercussions jusqu’au prochain jour. En effet, la pose des nouveaux rails de tram devait commencer le samedi après-midi à 15 heures. Les segments de rails sont prêts. Mais les travaux de mesure ne sont pas encore terminés. Les constructeurs de voies ferrées doivent pouvoir positionner les rails avant de les étayer et de les souder, explique Marc Fleury. Il se concerte brièvement avec Rico Vegezzi, le responsable général de projet des VBZ: une heure de retard, estiment-ils. Après avoir discuté de la situation avec Christian Meier, le responsable général de projet de l’Office des ponts et chaussées de la ville de Zurich, ainsi que tous les autres responsables, Marc lève l’alerte: de l’avis général, l’heure de retard ne devrait pas causer de problème. On peut encore la rattraper.

Le montage des voies reprend de plus belle et se poursuit pendant tout le reste de la journée et une nuit. Dimanche après-midi, le retard est déjà rattrapé de moitié. La pose de la couche de béton inférieure commence, les travaux durent dix heures. Ensuite, d’autres travaux de montage et de réception ont lieu. Enfin, le lundi matin arrive. Et de fait: le premier tram démarre à l’heure. A 4 h 59 exactement, à la minute près.

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